L’un des plus grand OVNI de la scène comics indé’ des années 1980… Moonshadow !

Dans (Re)Lire, nos rédacteurs se penchent sur des œuvres qui ne sont pas des nouveautés, mais qui ont marqué la littérature. Qu’il s’agisse de succès intemporels ou d’ouvrages injustement méconnus, venez (re)découvrir ces pépites du passé à nos côtés.

Il existe des œuvres que leur créateur considère comme leur réalisation ultime, leur magnum opus. Dedans, ils y ont tout donné, sans limite ni frein à leur imagination débridée, le tout affublé d’une vaste quantité d’éléments personnels, de leur philosophie. Parfois, cela donne des créations cryptiques, dont le sens même échappe à toute explication. D’autre fois, il en sort des chefs-d’œuvre comme il n’y en a qu’une fois dans une existence créative et le comic Moonshadow, du duo De Matteis/Muth  en fait indubitablement partie.

L’histoire

Moonshadow, vieil homme âgé de 120 ans, fils d’une hippie et d’un extraterrestre, est au seuil de sa vie. Se penchant sur son passé, il raconte l’enlèvement de sa mère et de son chat, Frodo, par une entité éclatante ressemblant à la lune avec un faciès humain. De cet enlèvement naîtra un enfant splendide et mélancolique. Devenant orphelin à l’adolescence, Moonshadow, accompagné du chat de sa mère et d’une humanoïde vénale nommée Ira, décide d’aller vivre dans les étoiles. Ce faisant, il y perdra un peu de son innocence, tentant également de trouver un sens aux actions de son père. 

Épopée spatiale, odyssée dickensienne

Après une introduction plutôt cryptique et très narrative autour de lunes kidnappant des races extraterrestres sans raison, l’histoire de notre jeune protagoniste prend vite des allures de contes de fée pour adultes, ce que nous annonce d’emblée l’intitulé de chaque livre du comic, au nombre de douze : A Fairy Tale for Growns-Up ! Parfois déroutant, parfois complètement new-age dans son approche, les tribulations du jeune héros vont de la satire sociale à l’aventure hallucinée sans queue ni tête, vers un point culminant qu’est celui qu’il nomme l’Éveil. 

Car Moonshadow est en quête d’un sens spirituel et philosophique à sa vie, voguant entre nihilisme et romantisme, entre une existence faite de sens et une autre qui en est dépourvue. Au travers de sa relation (plutôt toxique) avec Ira, créature vile qui l’amène sur le chemin de l’immoralité, notre personnage se questionne en permanence sur la notion de bien et de mal, et ce, malgré le fait qu’il soit tiraillé par des besoins adolescents explicitement évoqué (masturbation et j’en passe…). 

Moonshadow lorgne davantage vers le récit illustré que vers le pur comic, soyez prévenu. Mais cela permet de s’attarder davantage sur le travail graphique de J. Muth, qui nous sert ici une aquarelle vaporeuse, dont la mise en scène alterne peinture dramatique et symbolique, puis crayonné enfantin digne des Shadoks. C’est dans ce décalage constant que l’œuvre offre ses scènes les plus percutantes, des premiers émois amoureux à l’horreur d’une guerre absurde, en passant par un final des plus symphoniques.

Moonshadow est une rêverie d’enfant spatial hallucinante, une épopée dickensienne sur la rudesse de notre monde et sur ce qui nous construit, de l’amour à la guerre. Véritable OVNI de la scène comics indépendante des années 1980, cet ouvrage hors norme n’attend plus que vous. 

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