Le Roi des fauves

Si les mythes nordiques ont la côte ces dernières années, c’est une version particulièrement originale de la légende des berserkir1 que nous proposent David Chauvel et Sylvain Guinebaud dans Le Roi des fauves, aux éditions Delcourt. Une adaptation en B.D. du roman du même nom d’Aurélie Wellenstein, qui promet une aventure épique, en deux tomes.

« Ta transformation sera lente et atrocement douloureuse. Profite bien de tes derniers jours d’humanité, Ivar Hasteinson. »

Le Roi des fauves, Chauvel, Guinebaud, Lou

Berserkir

Lorsque le père d’Ivar tombe malade, alors que le village souffre déjà de la famine et que l’hiver fait rage, le jeune homme décide de braver l’interdit et d’aller braconner sur les terres du Jarl, en compagnie de ses amis Kaya et Oswald. Malheureusement, ils sont pris en flagrant délit, la rencontre tourne au drame et les trois adolescents sont condamnés à un sort pire que la mort : devenir des berserkir, des créatures mi-humaines, mi-bêtes, dénuées de raison et habitées d’une soif de sang meurtrière. Le seul espoir qu’il leur reste est de trouver le roi des fauves, qui semble capable d’annuler la malédiction et de les sauver de la folie.

Sombre et violent

On retrouve ici le trait du talentueux Sylvain Guinedaud, déjà à l’œuvre dans le spin-off des 5 Terres, Demeus Lor, qui fait une fois encore étalage de sa maîtrise lorsqu’il s’agit de mettre en scène de l’action virulente et des sentiments exaltés. On retrouve également Lou — qui s’est illustré auparavant sur la série Renaissance — à la couleur, pour donner le ton à cet univers de fantasy sombre et violent. Le trait est fort, précis, il donne tout son caractère à des personnages qui ont une véritable « gueule », tannée, couturée, abîmée par la vie et ses difficultés. 

On apprécie la manière dont sont représentés les flashbacks, l’album ayant fait le choix de commencer dès l’arrestation de Kaya, Oswald et Ivar et de nous faire vivre, par l’entremise d’une mise en cases en noir et blanc, le souvenir de leur « crime ». La mise en scène efficace fait la part belle à l’action et à la tension à laquelle sont soumis les protagonistes, du moment où ils subissent leur châtiment à celui où ils sont obligés de survivre dans un environnement glacé et hostile, pour se rendre jusqu’au domaine du roi des fauves. L’entraide sera primordiale pour les trois amis, dont la relation et les différents caractères ont été très bien représentés par le scénariste David Chauvel, habitué du genre, puisqu’il signe également Sigrid, qui raconte l’histoire des premiers colons scandinaves en Amérique du Nord. 

Des héros à la personnalité affirmée : Kaya, l’indépendante, Oswald, l’intellectuel et Ivar, le courageux, qui laissent rapidement entrevoir des tempéraments plus complexes que ce que leurs archétypes suggèrent. Si l’on s’attache très vite à ces trois-là, difficile de croire que leur histoire tiendra en deux tomes tant la fin de celui-ci nous laisse la sensation que le périple débute à peine et qu’il recèle encore mille dangers. Pour autant, au vu de la qualité de ce premier album, auteur et illustrateur ont toute notre confiance en ce qui concerne la suite de l’aventure. 

Cette adaptation du Roi des fauves fait sans conteste honneur au roman d’origine. Ambiance, style, mise en scène, tout y est. Autant dire qu’il nous tarde de découvrir le tome 2. Que l’on ait lu ou non l’œuvre d’Aurélie Wellenstein, cette version bande dessinée captive dès ses premières pages.
  1. Le terme « berserkir » est le pluriel de « berserker« . Contrairement à sa francisation dans le roman et la bande dessinée, nous avons gardé ici l’orthographe d’origine, qui ne nécessite donc pas de « s ». Pour en savoir plus sur la langue des vikings, cliquez ici ! ↩︎

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