Le Sauvetage est l’ultime roman de Paul-Jean Hérault, disparu en 2020. Auteur majeur de la science-fiction française, il s’était fait connaître avec Le Cycle de Gurvan, space opera antimilitariste, et Cal de Ter, une série d’aventures spatiales exaltant la débrouillardise humaine. Publié début mars chez Critic, Le Sauvetage est un récit court (250 pages) qui constitue une excellente introduction à son univers : une intrigue rythmée, des personnages pragmatiques et une critique sans détour du capitalisme. Nous l’avons reçu en service presse, il nous a plu, alors on vous en parle.
« Quand on a découvert les propriétés du cuivre irradié, la mémoire qu’il faisait naitre dans les circuits et le fantastique bond en avant qu’il permettrait à la technologie, on ne pouvait pas laisser passer ça…»
« Le Sauvetage »… mais de qui, au juste ?
L’histoire nous propulse sur une planète balayée par des tempêtes monstrueuses, où des vents terribles rendent tout atterrissage ou décollage quasiment impossible. Pourtant, des équipes minières y sont bloquées depuis des mois… sans vivres. Leur seule utilité aux yeux des compagnies ? Extraire du cuivre, devenu une ressource si précieuse que les exploitants n’hésitent pas à sacrifier des vies pour en récupérer chaque gramme. C’est dans cet enfer que débarquent Ewen Jalinn et ses compagnons, jeunes pilotes attirés par l’appât du gain et le frisson du défi. Leur mission : récupérer les mineurs… ou, soyons honnêtes, surtout leur précieuse cargaison. Car dans ce monde régi par le profit, les travailleurs ne sont guère plus que de la chair à canon, sacrifiée sans le moindre scrupule. Un mort de plus ou de moins ? Tant que le cuivre quitte la planète, peu importe. À tel point qu’une question s’impose : qui sauve-t-on vraiment dans cette histoire ?
Un rythme implacable au service d’une dénonciation brutale
Le rythme est soutenu, l’intrigue démarre très rapidement après une introduction brève et efficace à l’univers. Si le personnage principal m’a semblé un peu antipathique au départ, il devient attachant au fil du récit. Mais ce qui marque surtout, c’est la critique frontale du capitalisme sauvage. Ici, la logique du profit écrase tout, et Hérault ne laisse aucun doute sur l’absurdité et la cruauté du système. Enfin, difficile de ne pas penser à La Horde du Contrevent en voyant cette planète et son vent déchaîné… mais la comparaison s’arrête là. Là où Damasio explorait le langage et la quête existentielle, Hérault nous livre un récit tendu, pragmatique et ancré dans la science-fiction classique.
Un roman aussi court que percutant, qui nous rappelle que, dans la course au profit, ce sont toujours les humains qui payent le prix fort. Avec Le Sauvetage, Critic poursuit son travail de mise en lumière de l’œuvre de P.-J. Hérault, en publiant régulièrement ses romans, dont Gurvan, un incontournable du space opera français. Une belle occasion de découvrir ou redécouvrir ses écrits qui, des décennies plus tard, continuent de résonner avec notre actualité.