Si vous lisez ça, je suis déjà morte

Avec Matt Kindt (Revolver, Men of War ou encore Marvel Knights Spider-Man) au scénario et Dan McDaid (Doctor Who magazine, Doom Patrol, Firefly…) au dessin, Si vous lisez ça, je suis déjà morte, promet une lecture explosive… elle est en réalité cataclysmique ! Véritable déluge d’action, hommage parodique aux films bourrins des années 1990, débauche de moments gores dans une ambiance qui tutoie parfois du Lovecraft, ce one-shot de science-fiction ne laisse pas une minute de répit à ses lecteurs !

« J’aurais trouvé ça magnifique si l’odeur de sang et de chair brûlée n’avait pas été encore incrustée dans mes narines. »

Si vous lisez ça, Je suis déjà morte, Matt Kindt, Dan McCaid, Bill Crabtree

Survivante

Robin Reed est reporter. Cette fois, elle accompagne une équipe de soldats d’élite sur Terminus, une planète quantique hostile. À peine débarquée, l’équipe se fait décimer salement et Robin est la seule survivante. Pourchassée et coincée sur cette terre inconnue, peuplée de créatures dont elle ne parle pas la langue, elle va mettre à profit ses ressources de reporter de guerre sur Terre pour apprendre, s’adapter et survivre.
Et si une journaliste réussissait là où l’armée a échoué ?

Effréné

Dès les premières pages, les couleurs de Bill Crabtree (Ant-Man, Avengers, Invincible…) subliment les explosions et les gerbes de sang ! La fuite effrénée de Robin passe par des charniers puants et des cités crasseuses, entrecoupée de moment où elle trouve refuge chez d’autres opprimés locaux, ce qui lui permet d’apprendre peu à peu la langue, la culture et les codes qui régissent Terminus. De proie, elle passe bientôt à espionne, puisqu’elle s’intègre et se fond petit à petit dans la masse hétéroclite qui peuple la planète. L’occasion de montrer que, peu importe les peuples et les endroits, certains mécanismes de domination et d’oppression sont universels. 

Malgré son univers violent et sombre, le récit se permet de parodier les œuvres d’actions bourrées de testostérone des années 1990. Dans la manière de présenter son équipe de bourrins au début, qui rappelle celle de films tels que Predators, et la façon viriliste de ces derniers de traiter Robin. Cette dernière ne manque d’ailleurs pas de souligner qu’elle est loin d’être une faible femme, chose que le récit démontre parfaitement. Plus tard, l’aventure se mue en épopée lovecraftienne, avec ses colosses de chair, ses anciens dieux meurtriers et ses sectes monstrueuses. Loin des cantinas de Star Wars ou des conglomérats spatiaux de Mass Effect, Terminus est une planète sale, dérangeante, difficilement appréhendable pour un esprit terrien. 

Au-delà de son histoire de science-fiction à l’action effrénée, Si vous lisez ça, je suis déjà morte pose un regard critique sur la société, les religions, la guerre et les médias. Placer son contexte au sein d’une civilisation alien fictive ne l’empêche pas de faire écho à de vraies horreurs typiquement humaines. Son excellent final vient confirmer la volonté des auteurs de mettre un tacle aux politiques néocolonialistes et aux croyances aveugles.
Et pour ceux qui n’ont pas envie d’y réfléchir, il reste un récit nerveux et sanglant, digne du mariage entre Mad Max Fury Road et les aventures de John Carter.

« Traverser le monde… L’univers… Tout ça pour voir que rien ne change. »


Si vous lisez ça, je suis déjà morte laisse éclater sa fureur dans un album grandiose, qui malgré sa violence et son cynisme met en scène une héroïne particulièrement humaine. Son regard, celui d’une journaliste plutôt que d’une guerrière, apporte une lecture nouvelle et fascinante au comic d’action. C’est parfois un peu trop rapide, on aimerait que chaque nouvelle révélation nous laisse un peu plus de temps pour l’intégrer avant que le récit ne bondisse vers une autre surprise, mais cette œuvre de S.-F. qui ne fait pas dans la dentelle marquera à coup sûr ses lecteurs. 

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