Les Semi-Déus tome 2, le retour des enfants prodiges

Ceux qui ont lu le premier tome de cette B.D. signée Juliette Fournier et Jean-Gaël Deschard auront dû attendre un an avant de pouvoir découvrir la suite des aventures d’Asmodée la métamorphe, de son amie Oni ou encore de la jeune et mystérieuse Namielle. 

Pour les autres, un petit résumé s’impose : Issue d’une famille d’agriculteurs menacée par la famine, Asmodée est vendue par son père à la puissante reine Bérénice. Dans son royaume où la misère côtoie la richesse, certains enfants abandonnés ont curieusement développé des pouvoirs extraordinaires : ils sont désormais ce qu’on appelle des Semi-Déus. Asmodée possède le pouvoir de changer son apparence à l’infini. Bien qu’elle fasse désormais partie d’une élite vénérée par la population, elle n’en est pas moins condamnée à servir la reine, seule personne à connaître le secret de « fabrication » des Semi-Déus. Si Bérénice a su fédérer autour d’elle les autres cités grâce à ses connaissances, il est certain que ces dernières attirent les convoitises.

Malgré son style doux et ses belles couleurs, Les Semi-Déus s’est vite révélée une bande dessinée sombre, souvent violente, qui met en avant des intrigues politiques et religieuses complexes. On s’attend donc à ce que ce deuxième tome, baptisé Double-jeu, soit tout aussi cruel, intrigant et bourré de surprises que le premier. Autant dire que nous avons été servis !

« En réalité, le plus préoccupant pour nous, c’est que les Semi-Déus soient perçus comme les envoyés des dieux dans certaines cités… Une vaste imposture, certes… Mais comment justifier notre supériorité hiérarchique auprès de la plèbe dans ces conditions ? »

Les Semi-Déus tome 2 Double-Jeu, Juliette Fournier, Jean-Gaël Deschard

Double jeu1

Ce tome 2 commence directement là où le précédent se terminait  : par la mort du prince Wilzir, qui risque de déstabiliser la paix entre la Ligue des cités-États. La reine Bérénice charge donc Asmodée de prendre son apparence — et sa place — afin de simuler un accident qui n’impliquera pas le royaume de Sayran. Accompagnée de Nyx, un mystérieux Semi-Déus qu’Asmodée n’a jamais rencontré, elle prend donc la mer pour un long voyage. Mais, à l’image d’Omni, sa déesse araignée tutélaire, la reine a déjà tissé une toile de manigances complexes. Ignorant ses véritables ambitions, la jeune fille va devenir l’outil d’une conspiration politique sanglante. Pendant que la métamorphe se débat avec des intrigues qu’elle ne contrôle pas, les amraïtes, adeptes de la déesse Amra, tentent un coup d’État à Sayran…

Des enfants, des esclaves, des monstres…

Si le premier album des Semi-Déus avait commencé fort en matière d’intrigues, de duplicité et de cruauté, celui-ci pousse le curseur un cran plus loin en permettant aux lecteur·ices de découvrir Ferroc. Dans cette cité-État, les Semi-Déus offerts en cadeau de la part de Sayran afin d’honorer les alliances scellées avec la reine, sont traités en esclaves et considérés comme des abominations. Si Asmodée espérait y trouver un peu de l’humanité et de la bienveillance qui manquent au royaume de Bérénice, elle sera vite déçue ! Le roi de Ferroc ne souhaite rien d’autre que rétablir un gouvernement où le pouvoir sera détenu par ceux nés nobles et non par « une reine vieille de plusieurs siècles[,] des gueux qui se pavanent comme des nobles[,] des femmes qui prennent le pouvoir ». 

Ce tome vient appuyer le fait que les Semi-Déus ne sont que des objets conçus pour servir les ambitions de leurs créateurs. Car si les autres cités de la Ligue cherchent désespérément le secret de la formule qui permet de concevoir ces humains dotés de superpouvoirs, c’est uniquement pour les utiliser, certains comme des armes, d’autres comme des outils. Il en va de même pour le culte religieux d’Amra, l’une des quatre grandes divinités larissiennes, qui utilise la jeune Namielle afin de s’octroyer les faveurs du peuple et de renverser les autres cultes. Dans ce tome, leur fanatisme gagne en ampleur et c’est avec beaucoup de crédibilité que Fournier et Deschard nous montrent comment une religion qui promeut, à l’origine, l’entraide et la charité en vient à réclamer violence et haine envers toutes les autres.

On apprécie la manière dont les deux artistes sont parvenus à réinterpréter le Japon médiéval, particulièrement dans les costumes, très riches, de leurs personnages. Le style de Juliette Fournier, déjà connu grâce à Bakamon, se montre toujours aussi frais et lumineux… Un peu trop, peut-être, pour une histoire aussi sombre que celle des Semi-Déus, mais c’est aussi le propre des auteur·ices de bousculer nos habitudes pour nous faire découvrir de nouvelles façons de raconter les histoires. Il n’en reste pas moins que ce tome parfaitement rythmé se conclut sur des révélations lourdes de conséquences pour la suite. Une suite que nous avons hâte de découvrir.

Avec ce second tome mêlant intrigues à la Game of Thrones, superpouvoirs façon The Boys et fantasy japonisante, Les Semi-Déus confirme son caractère original et son ambition de délivrer un récit vaste et épique. Sortie prévue le 22 janvier.

Cette B.D. a été critiqué dans le cadre d’un service presse.

  1. Le titre de l’album est bien Double-Jeu, cependant, en orthographe française, le trait d’union n’est pas requis. ↩︎

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