Bestia, the french kaiju

Bestia est la toute première série du jeune dessinateur français Corc et on peut dire que pour un début, ça envoie du lourd ! Une jungle urbaine à l’ambiance rétrofuturiste, des animaux géants, un postapo sur fond de reconstruction sociétale et personnelle… Et un style qui s’inscrit parfaitement dans les publications des Humanoïdes associés. Pas étonnant que l’éditeur ait signé pour deux volumes de Bestia ! Chez les Mille Mondes, nous avons eu la chance de découvrir en avant-première le tome 1, qui sera disponible le 2 janvier.

« Je me fiche de sauver ta cité miteuse. Je suis juste là pour chasser ma proie ! »

Jacquie, Bestia, Corc, les Humanoïdes associés

Le monde a changé

Depuis que les bestias sont apparues pour semer la destruction, le monde a changé. Ces créatures gigantesques, capables de raser un quartier en quelques minutes, ont radicalement transformé la société humaine, poussant les gens à s’organiser pour survivre.
Jacquie est une traçaire, une chasseuse de bestias douée, mais solitaire, à la recherche d’un monstre bien particulier : celui ayant autrefois détruit la cité des Cécropias. Sa traque l’amènera à rencontrer Kevyn, un magouilleur au grand cœur, maladroit, mais débrouillard, et mécano à ses heures, qui décide de lui apporter son aide. Une association improbable, qui pourrait permettre à Jacquie d’affronter enfin la bête des Cécropias, mais également son passé.

Jungle urbaine

Bestia, c’est un superbe mélange de bande dessinée, de manga, d’inspirations hollywoodiennes, d’architecture, d’action et d’humour. Ça propose des planches dignes de Blame!, une héroïne indépendante et forte en gueule, le tout dans un univers à la fois très proche et pourtant très différent. Corc est parvenu à créer une histoire originale avec des personnages attachants, un rythme agréablement mené et suffisamment de mystère pour se montrer original, sans perdre ses lecteurs. 

On sent particulièrement les connaissances en architecture de l’artiste derrière les plans qui donnent toute sa place à la cité. Dans Bestia, la ville est un personnage à part entière : mystérieuse, vaste, tentaculaire, faite de bric et de broc et dont les immeubles qui s’élèvent encore vers le ciel témoignent de la grandeur passée. Elle est aussi sans âge, malgré certains aspects très futuristes du scénario, on y reconnaît une enseigne, un quartier, qui évoque nos mégalopoles actuelles. En périphérie de ses zones habitées, la cité de Bestia propose d’illustrer avec beaucoup de talent l’expression « jungle urbaine », à travers des décors où le béton cède peu à peu sa place à une nature qui cherche à reprendre ses droits.

Un duo efficace

Le duo formé par Jacquie et Kevyn fonctionne particulièrement bien. Lui en petite frappe vivant de deals et de magouilles, mais qui voue une admiration presque infantile pour les traçaires, en plus d’une gentillesse et d’un sens de la solidarité sans faille. Elle qui cache ses faiblesses derrière un masque froid et impassible, mais qui s’ouvre peu à peu devant le naturel et l’affabilité du garçon, dont elle profite parfois trop. Ils bénéficient tous deux d’une écriture très humaine, très crédible. Des personnalités au réalisme renforcé par un design très éloigné des stéréotypes. 

Les bestias sont aussi des personnages à part entière. Leurs origines mystérieuses, le fait qu’elles se fondent dans l’environnement malgré leur taille gigantesque, leur attitude également, puisqu’elles sont présentées comme des monstres, mais ne semblent pourtant causer que des dégâts collatéraux. Loin des créatures mangeuses d’hommes, elles se contentent de traverser la ville tels des animaux en migrations, dédaignant les minuscules humains à leurs pattes. Si elles finissent par montrer les crocs, c’est uniquement pour se défendre et leur apparence animale, loin des kaijus monstrueux, les rend finalement plus intrigantes qu’effrayantes.

Bestia est sans conteste l’album qui va lancer la carrière de Corc, tant ses qualités, graphiques comme narratives, sont évidentes. On regrette presque qu’il ne sorte pas assez tôt pour pouvoir être mis sous le sapin, mais après tout, qu’est-ce qui nous empêche de fêter Noël en janvier ?

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